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La consultation citoyenne dans la stratégie vaccinale contre le COVID -19

Dernière mise à jour : 9 juin 2021




La lutte contre la défiance vaccinale passe par la « démocratie sanitaire », car la France est un Pays où la crainte du vaccin est forte. C'est pour légitimer la gestion de la crise sanitaire que le gouvernement a sollicité les citoyens sur la stratégie vaccinale contre le COVID 19.


Déjà en 2016, avant la crise sanitaire actuelle, un « comité d'orientation de la concertation citoyenne sur la vaccination »(1), avait consulté les citoyens pour connaître les freins à la vaccination(2). Une telle consultation a continué, jusqu’en 2018, lorsque le ministère de la santé sous Agnès BUZYN a fait passé le nombre de vaccins obligatoires pour les enfants de moins de deux ans(3)de trois à onze.


Ce concept de démocratie sanitaire existe depuis le début de la crise du COVID-19. Il fut évoqué dans le SEGUR de la santé (4), qui s’est déroulé de mai à juillet 2020(5). Mais, c’est le 15 décembre 2020(6), que l’office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sur la stratégie vaccinale contre la COVID-19 a soulevé l’impératif démocratique dans la gestion de la crise sanitaire. Il y est exposé la volonté de « Restaurer la confiance par la transparence ». Il y est même dit que « la démocratie sanitaire vise la participation citoyenne aux politiques de santé. Dans la période récente la démocratie sanitaire cède de plus en plus le pas à un concept nouveau, plus large, la démocratie en santé. ». C’est dans ce même rapport qu’un collectif citoyen est recommandé car il serait la garantie pour une « totale transparence du suivi de la vaccination ».

L'institution chargée de mener cette consultation est le Conseil Économique Social et Environnemental (CESE), qui chapeaute l’organe de gestion de crise spécialement créé pour suivre la vaccination le Conseil d’Orientation de la Stratégie Vaccinale (COSV). Néanmoins les citoyens n’est qu’un (7) des quatre aspects de la stratégie vaccinale :

  1. Le comité scientifique sur les vaccins COVID 19 (8)

  2. Le comité des parties prenantes.

  3. Le comité des élus locaux.

  4. Le comité citoyen.



Critiquée par certains comme un outil de communication au service du gouvernement, le comité citoyen suscite des interrogations sur sa véritable utilité. Cette instance associe les citoyens de deux manières, tout d’abord en les tirant au sort pour qu’ils composent un Collectif Citoyen (I) puis en récoltant leurs opinions à travers une plateforme de consultation en ligne (II).


I. LE COLLECTIF CITOYEN

Composé de 35 participants tirés au sort fin 2020 il s’est réuni pour la première fois début 2021(9). Il a pour rôle de formuler des observations sur la politique vaccinale, et de faire état des interrogations, peurs, résistances et questions éthiques que suscitent la vaccination contre le COVID-19.


  1. Composition et fonctionnement du collectif citoyen


Ce tirage au sort, sensé permettre une meilleur représentation de la diversité de la population, est la prolongation naturelle de l’organisation de la convention citoyenne pour le climat (10)qui utilisait cette technique propre au CESE(11). Des vidéos (12) où l’on voit les participants, font état d’un fonctionnement convenable(13) et témoignent de la diversité des profils. Ces derniers se réunissent en plénière au minimum 3 jours par mois avec des experts, ou des acteurs de terrain (14). Ils ont également la possibilité de se réunir en effectif réduit lors d’ateliers dédiés à des thèmes précis (Les vaccinodromes ou les équipes mobiles à la vaccination, etc.).

A l’issue de ce processus, ils émettent un avis commun contenant des recommandations et des préconisations pour améliorer la politique vaccinale, à ce titre un premier rapport comprenant des recommandations sur l’orientation de la politique vaccinale est publié le 27 avril 2021(15). Puis d’avril à fin juillet le collectif suivra la campagne grand public et enfin il établira le « bilan et le suivi » de la campagne de vaccination (16). A l’heure de la rédaction de cet article nous avons passé la phase de préparation et nous sommes dans la phase « accompagnement ».(17)

Il demeure que la consultation de cette instance citoyenne est facultative et ses avis n’ont rien d’obligatoires, il s’agit seulement de permettre aux citoyens de s’exprimer sur la politique vaccinale contre le COVID 19.


2. Les recommandations du Collectif Citoyen(18)


Le 27 avril 2021, le collectif citoyen a publié un rapport de 42 pages accessible en données ouvertes sur le site du CESE (19). Ce dernier regroupe 8 fiches projets répondant aux interrogations du président du COSV, M. Alain FISCHER(Clarté du message vaccinal , améliorer la communication, mieux vacciner en améliorant la coopération entre les professionnels de santé et aller vers les publics jeunes et marginalisés). L’on y trouve des avis pratiques et opérationnels ciblant des acteurs et des méthodes pour améliorer la mise en œuvre de la politique vaccinale. Toutes les informations qui y figurent ne peuvent pas être représentées fidèlement ici, ainsi nous vous encourageons à lire directement le texte du rapport.


La premier thème concerne l’amélioration de la clarté du message de la politique vaccinale à l’égard du grand public, car c’est un enjeu essentiel d’adhésion de la population. Il conviendrait de faire des messages simples qui se référent d’avantage à l’expérience des personnes vaccinées plutôt que de faire une information qui change du jour au lendemain. Selon eux cela a pour effet de désorganiser les professionnels de santé et de désorienter les Français. Ils recommandent que la communication médiatique de gestion de crise soit séparée des enjeux politiques afin d'éviter le mélange des genres (page 5 : ils déplorent la campagne de communication soit-disant « ludique », mais très politique... a l’égard des jeunes avec les youtubeurs McFly et Carlito). Ces postures décrédibilisent la parole politique et discréditent l’État. Cela fut également le cas lorsque le gouvernement a décidé de confiner localement les Alpes Maritimes ou le Pas de Calais et pas l’île de France. Ce manque de cohérence est également souligné à la page 7 à propos du changement de nom d’Astra Zeneca en Vaxzevia suite au scandale de la Thrombose. Afin de réduire la cacophonie, ils proposent, entre autres, de nommer une personnalité identifiée pour prendre la parole systématiquement dans un domaine d’expertise.

A propos des informations scientifiques sur la vaccination ils conseillent d’exposer également les solutions alternatives à la vaccination comme les traitements pour soigner contre le COVID 19. Selon eux il est illusoire de faire croire que tout le monde pourra être vacciné. Leur conseil au niveau logistique est de mobiliser chaque acteur local et national à différents niveaux pour plus d’efficacité. A ce titre ils exposent que le discours anti-vaccin ou le manque de coopération entre certains professionnels de santé est dommageable.

Concernant la communication sur la politique vaccinale le collectif recommande de bien prendre en compte les différents publics et de ne pas seulement se concentrer sur les personnes en cours de vaccination. Ils soulignent que les canaux de communication doivent être adaptés à chaque catégorie de population et s’orienter à la fois sur les bénéfices individuels et collectifs de la vaccination. Cela permettrait de réduire le nombre de personnes qui se sentent marginalisées et exclues par la politique vaccinale.


Afin de mieux comprendre les attentes des français les décideurs doivent écouter les remontés des territoires. Le collectif va même jusqu’à proposer à la page 15 et 16 des messages adaptés à différents types de publics (anti vaccin, personnel soignant, jeunes, ect.). Il peut s’agir aussi bien des institutions publics que des professionnels de santé que de tous les corps de métier ( page 19 : coiffeurs, etc .). Les conseils pratiques se précises jusqu’au choix de l’affiche ou du prospectus qu’il convient de créer et où il faut les laisser, ils proposent également des slogans pro vaccination, de faire des campagnes de SMS, etc. Pour compléter ce dispositif ils suggèrent entre autres de désigner des ambassadeurs thématiques pour relayer le message de la vaccination et de faire des débats télévisés ou encore qu’il y est des émissions hebdomadaires, etc.


Dans un deuxième temps le collectif cherche à comprendre comment rendre la coopération entre professionnels de santé plus efficace, afin de mieux vacciner les citoyens.


Puis dans un troisième temps le collectif se demande par quel moyen améliorer l’accès au vaccin. A cette fin le collectif propose deux solutions. La première consiste à « aller vers » les publics à vacciner grâce à différentes modalités (bus de vaccination, maraude, etc.) pour vacciner les personnes qui ne vont pas d’elles même vers les centres de vaccination. La seconde réside dans l’amélioration de la prise de rendez vous pour se faire vacciner, en créant par exemple des points de contacts locaux facilement accessibles ou en ayant un service de réception téléphonique efficace (ce qui ne serait pas le cas actuellement).


Enfin, le collectif s’interroge sur la manière d’orienter la campagne de vaccination vers les jeunes et en fonction des critères sociaux. Ce public est délaissé par l’approche du gouvernement, pourtant ces «jeunes » entres 17 et 30 ans sont très connectés et transmettent de nombreuses informations. Pour s’adresser à eux, il est nécessaire de créer des canaux de communication qui leurs soit directement dédiés et que le message soit adapté. Il est proposé, entre autres, de mettre en place un ambassadeur jeune au sein de chaque université pour que ce dernier puisse expliquer la vaccination.


Ils conseils de ne pas oublier les publics marginalisés, immigrés ou précaires. Ces derniers sont les laissés pour compte de la vaccination mais si l’on veut l’immunité collective, il ne faut pas les oublier. Ainsi, le collectif recommande de bien les prendre en considération en utilisant les structures d’aide sociale déjà existantes pour les approcher. Il est également proposé de leur accorder en priorité le vaccin Johnson et Johnson qui ne nécessite qu’une seule injection.


Même si certaines remarques jugent sévèrement la politique gouvernementale en matière de vaccination, le collectif demeure pertinent, de bon sens et dans l’air du temps. Au delà de la synthèse affichée sur la page du CESE le rapport écrit et validé par le collectif est bien plus instructif, c’est pour cela que nous vous en recommandons la lecture. Il y est notamment dit à la page 14, ce qui est pour le moins inquiétant … « Par notre participation au collectif nous avons appris que la plateforme vaccinationcovid.lecese.fr est destinée à recueillir ces questionnements et à y répondre de manière continue. Nous n’en avions pas entendu parler précédemment. » Cela signifie que le collectif n’était apparemment pas au courant de l’autre dispositif de consultation citoyenne sur la vaccination déployé par le CESE…


II. LA PLATEFORME DE CONSULTATION PUBLIQUE


D’une autre manière, la plateforme de consultation explore le désir de se faire vacciner et l’acceptation de la mise en place d’un passeport vaccinal. Cette dernière exprime un reflet direct et authentique de l’opinion publique. Grâce à des questionnaires, il y a eu une enquête sur les motivations et les hésitations à ce faire vacciner, puis un débat sur la mise en place d’un passeport vaccinal.


1. L’élaboration de la plateforme de consultation numérique

Chacun peut accéder à cette plateforme en ligne depuis le 15 janvier 2021, qui propose des questionnaires en ligne ainsi qu’une plateforme numérique pour recueillir les avis des citoyens (20). La société chargée de mettre en place cette plateforme est Cap Collectif (21), il s’agit de la même start up de la Civic Tech qui a mis en place la plateforme du grand débat.


Sur la plateforme les contributions sont libres, et l’on peut proposer des questions et des réponses. Ainsi, 507 participants ont formulé 679 contributions que l’on peut retrouver sur le site (22) . Ces contributions sont étiquetées par thèmes(sûreté vaccin, calendrier, consentement, etc.). Puis une centralisation définitive de toutes les contributions est faite sur des fichiers Excel (23).

Le format des questionnaires, ouvre la possibilité de réponse à l’ensemble ou seulement à une partie des questions. Le but affiché est d’être une enquête sur les motivations et hésitations au sujet de la vaccination et d'ouvrir un débat sur la mise en place d’un passeport vaccinal. Toutes les données des réponses synthétisées ou détaillées sont ouvertes et librement consultables (24).


2. Les résultats de la consultation de la plateforme en ligne

L’exploration sur les motivations et hésitations au sujet de la vaccination a été orienté autour de trois thèmes. Le premier "Je souhaite me faire vacciner ou je suis déjà vacciné"(25) où 1 485 personnes ont participé, puis le deuxième"Je suis encore en réflexion"(26) où 174 personnes ont participé, et enfin le troisième "Je ne souhaite pas me faire vacciner"(27) où 246 personnes ont participé.La forte disparité du nombre de participants entre la première enquête et les deux autres peut nuire à la lecture comparée des résultats pour être certain du reflet de l’opinion.





C’est toutefois le débat sur le passeport vaccinal qui est le plus intéressant. En effet, ce débat a permis la participation de 110 507 participants. Parmi eux 67,1% se déclarent très défavorables a la mise en place de ce passeport, 20,2% se déclarent très favorables, 5,6% se déclarent défavorables, 5,1% se déclarent favorables et 2% se déclarent mitigés à la mise en place d’un passeport vaccinal. L’on constate ainsi un fort rejet vis à vis de la mise en place d’un passeport vaccinal. Les résultats des participants sont accessibles sous format Excel.(28) Cette consultation ressemble à une classique enquête d’opinion.


A côté de ces deux dispositifs, le comité citoyen organise également l’audition des acteurs de la vaccination (ce qui est fait dans le programme 4 de leur réunion avec l’audition des acteurs de terrains) et met en place une veille des pétitions citoyennes sur la vaccination. Malheureusement, aucune trace de retour de cette dernière activité n’est remontée.


Malgré ces consultations instructives, il semble que le COSV porte peu d’importance au Conseil Citoyen, car sur 11 différents avis, notes et recommandations(29) publiées par ce dernier, l’on retrouve seulement un avis qui expose, lors d’une très brève mention, que le conseil citoyen doit être associé à la communication qui a lieu avec les professionnels de santé pour les rassurer sur la stratégie vaccinale « Associer le conseil citoyen : Nous proposons qu’une question sur le dialogue avec les professionnels et les conditions de la confiance soit intégrée dans le mandat qui sera confié au conseil citoyen délibératif animé par le CESE. » (...) P.21 (30)


Une réorientation de la communication vaccinale vers les jeunes est envisagée, ce qui est le tournant naturel de la stratégie vaccinale. Cette consultation citoyenne s’avère intéressante et pleine de ressources. Elle montre que les citoyens, quels qu’ils soient et d’où qu’ils viennent, ont un avis pertinent à donner sur les politiques publiques aussi exceptionnelles ou urgentes soient-elles.


Ainsi, bien loin des clivages politiques et des polémiques qu’avaient suscitées sa création (31), le collectif citoyen et la plateforme consultative apportent un point de vue pertinent sur le déroulé de la politique vaccinale mise en œuvre par le gouvernement. Il convient néanmoins d’être prudent car le marketing consultatif n’est pas loin comme le disait le même rapport parlementaire cité plus haut« Il serait regrettable qu’une telle structure conduise à contourner les acteurs existants en mettant en scène un rapport direct avec des citoyens. ».(32)


2https://www.vie-publique.fr/rapport/36133-rapport-sur-la-vaccination-comite-d’orientation-de-la-concertation-cit






11Article 4-3 Ordonnance n° 58-1360 du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique, social et environnemental















 
 
 

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